Survivre dans le Haut-Atlas

Près d’Imlil, dans les hauteurs du Haut-Atlas, des centaines de familles isolées attendent les paniers alimentaires, chaque année distribués par l’association Les Amis du CHU de Marrakech. Une opération actuellement bloquée par le gouverneur de la région d’El Haouz pour raisons sécuritaires
Se tourner vers notre misère, avant de regarder celle des autres.

C’est ainsi que le docteur Zouhaïr Lahna, président de Médecins du Maroc (MdM), s’adresse aux Marocains. Imaginer la vie de nos citoyens des montagnes de l’Atlas, particulièrement en cette saison hivernale où le froid paralyse et tue parfois. Imaginer leur vie quand la pluie tombe en rafales, si précieuse pour nos réserves d’eau futures et pourtant meurtrière. La misère, l’enclavement et les difficultés climatiques sont à nos portes. Des populations qui organisent leur survie comme à Imlil et Imnan ou, encore, Zarkten et Aït Hkim, où les villageois font tout pour que les femmes n’accouchent pas entre décembre et février, période pendant laquelle la moindre complication aboutit à la mort du nouveau-né et parfois de la mère, qui est souvent une jeune maman. La neige et le froid les obligent à rester cloîtrer chez eux auprès de leurs animaux, qui les réchauffent. L’alimentation devient alors rare, puisque économisée jusqu’à ce que les routes redeviennent praticables.

De retour de Gaza, ses témoignages ont touché et motivé la mobilisation. Cet élan, Lahna veut le mettre au service des plus fragiles, les familles composées de veuves et d’orphelins marocains. Agir de l’intérieur puisque ses voyages humanitaires, comme celui destiné à la formation de sages-femmes et de filles des villages aux soins de base, organisés de France, ont été annulés sur décision du gouverneur de la région. Tout comme la distribution de paniers d’hiver et toutes actions d’aide associatives. C’est ainsi que l’opération de l’association Les Amis du CHU de Marrakech qui, chaque année, distribue des produits de première nécessité à plus de 500 familles dans le besoin, soit près de 2.000 personnes, a été annulée. Les raisons avancées de ce blocage sont sécuritaires. Pourtant, quelle sécurité offrons-nous aujourd’hui à ces enfants et à ces femmes isolés? Les acteurs de la société civile demandent des comptes à nos dirigeants, espérant qu’une enquête soit ouverte sur les agissements de ce gouverneur et de son “khalifa” afin de tirer au clair les raisons qui empêchent cet élan de solidarité humanitaire.
En attendant, tous ceux qui le peuvent sont appelés à, individuellement ou collectivement, porter secours aux démunis du Haut-Atlas. Car, comme le rappelle Lahna, “quand nous allons vers l’autre, c’est vers nous-mêmes que nous avançons. L’effort permet d’extraire le meilleur de soi, son humanité et son empathie”.